Genève ville créative

Le blog de Sami Kanaan

  • Le Léman Express : essentiel et bienvenu. Mais insuffisant !

    La densité de trafic automobile à Genève devient franchement inquiétante. Elle a des conséquences négatives sur tous les plans : sur l’environnement bien sûr, mais aussi sur la santé, l’économie, la qualité de vie. La nécessité d’inverser le cap paraît évidente mais cette surcharge semble s’aggraver et s’installer dans la durée. Le Léman Express qui devient enfin réalité dans une semaine va certainement améliorer la situation, mais sera-ce suffisant ? De loin pas ! Il faut imaginer et concrétiser une histoire ambitieuse et positive pour notre transformation urbaine !

     

    Ce dimanche le réseau du Léman Express sera enfin inauguré, plus de 100 ans après ses prémisses. Il apportera certainement une contribution précieuse au transfert modal de la voiture privée vers les transports publics. Le Léman Express contribuera à diminuer la charge de trafic mais cela ne suffira de loin pas ! Ce n’est que le premier pas d’un nécessaire développement de l’offre ferroviaire régionale afin d’avoir un réseau complet et dense digne de ce nom. Car le changement d’habitudes ne se fera que si des solutions efficaces et abordables sont proposées. Et ce n’est qu’à cette condition que, parallèlement, il sera légitime de prendre des mesures coercitives de réduction du trafic individuel motorisé. Car la prise en compte de l’urgence climatique ne pourra se faire que dans la justice sociale. Le mouvement des gilets jaunes en a témoigné !

    Un Comité unitaire pour soutenir le projet CEVA

    En 2004, je siégeais au Grand Conseil en tant que député socialiste. Une époque où pratiquement personne – en dehors d’un petit cercle de passionné-e-s – ne parlait de ce qui allait devenir le CEVA (devenu « Léman Express »). Avec Gabriel Barrillier, alors député du Parti radical (devenu PLR) et secrétaire général de la Fédération genevoise des métiers du bâtiment (FMB), nous avons décidé de créer un Comité unitaire afin de défendre et promouvoir ce projet. Comme Robert Cramer le racontait encore récemment dans le Temps, le projet de raccordement ferroviaire Cornavin-Eaux-Vives-Annemasse a failli ne jamais ressortir de l’oubli total où il se trouvait. Lui-même a compris l’enjeu bien avant d’autres élues et élus de l’époque. Il a ensuite fait preuve d’opiniâtreté et de talent pour transformer une utopie en une réalité politique et institutionnelle, puis opérationnelle.

    Mais il fallait aussi rassembler un front large autour d’une idée ambitieuse, surtout à Genève où les dossiers des transports ont une fâcheuse tradition à polariser le monde politique. Ce Comité Pro CEVA a rassemblé tous les partis de l’époque sans exception, les organisations économiques et syndicales, le TCS et l’ATE, sans oublier le rôle clé de l’association Alprail et de son infatigable promoteur, Sig Maxwell, décédé il n’y a pas si longtemps.

    Sous la coprésidence de Gabriel Barrillier et la mienne (puis avec Elisabeth Châtelain, députée socialiste, qui m’a remplacé), nous avons ainsi pu créer un front très large en soutien au projet. Une mobilisation qui s’avérera précieuse par la suite, lorsqu’il fallut faire face aux vents contraires, aussi bien pendant les débats parlementaires que, surtout, dans l’opinion publique.

    Réseau ferroviaire régional : encore beaucoup à faire !

    15 ans plus tard, le Léman Express va être inauguré, ce dimanche 15 décembre 2019. J’entends encore maintenant certaines voix prétendre qu’il sera vide. Je fais le pari qu’il sera vite saturé ! A chaque voix qu’une nouvelle offre ferroviaire régionale efficace et de qualité a été mise en place dans notre région, les trains ont été vite pleins, même lorsque les parkings-relais (P&R) n’étaient pas encore disponibles. Cela a été valable aussi bien entre Genève et la Plaine qu’entre Genève et Coppet, ou chez nos voisins entre Evian-Thonon et Annemasse.

    Aujourd’hui, le Léman Express n’est pas l’aboutissement d’une démarche ; c’est un premier pas, certes important, mais largement insuffisant. Le prochain chantier de grande ampleur sera l’extension de la gare Cornavin avec 2 puis 4 voies souterraines supplémentaires, chantier que certains contestent encore au nom d’une vision passéiste du transport régional. Faut-il rappeler que, pendant que certains esprits frondeurs bien genevois s’amusent à couper les cheveux en 4 juste pour exister, les autres cantons avancent et obtiennent des soutiens fédéraux ?

    Pour le réseau régional, nos voisins français doivent accélérer la mise à niveau de ce réseau sur le plan technique et sur le plan de l’offre, par exemple pour améliorer la desserte sur Annecy, ou, en collaboration avec la Suisse, rétablir une liaison complète sur la rive sud du Lac Léman (la liaison dite du Tonkin). Il devient également impératif de prévoir une réelle offre ferroviaire sur l’Ouest du Canton, vers le pays de Gex, plusieurs options étant possibles. Et sur le territoire genevois, des plans existent heureusement, par exemple pour créer une halte à Châtelaine, créer une connexion directe entre l’axe en provenance d’Annemasse et l’aéroport et une tangente vers l’aéroport depuis la Suisse, ainsi qu’une liaison ferroviaire diamétrale telle qu’annoncée par le Canton. A ces projets ferroviaires indispensables et urgents s’ajoute la nécessité d’accélérer la réalisation des projets de tram.

    Des mesures drastiques de réduction du trafic automobile, socialement équitables

    Encore qui concerne le trafic automobile, rappelons 4 chiffres :

    1. Un bon tiers des véhicules privés en circulation à Genève font en moyenne moins de 3km pour leurs déplacements.
    2. 95% des 600’000 passages quotidiens de la frontière avec la France se font en voiture.
    3. Pendant les vacances scolaires on considère qu’il y a 7 à 10% de véhicules en moins qui circulent, et l’effet est déjà très net sur la situation dans les rues.
    4. Plus de 40% des ménages de la Ville de Genève n’ont pas (ou plus) de voiture (dont moi d’ailleurs).

    Il faut un programme ambitieux de réduction du trafic automobile classique en ville, avec des mesures à la fois dissuasives et incitatives. La dissuasion passe notamment par une réduction massive des nombres de places de stationnement, une augmentation substantielle des taxes sur les véhicules les plus puissants et les plus polluants (en attendant leur interdiction), l’instauration d’un péage urbain, entre autres. Mais il est impératif d’accompagner ceci de mesures fortes et crédibles pour aider à la transition et éviter un impact social rédhibitoire. Il faut envisager des incitations financières sur la conversion vers des moyens de transport individuel moins polluants (vélo, vélo à assistance électrique, voire même scooters électriques), ainsi que les réseaux d’auto-partage (à motorisation alternative) et une baisse des tarifs des transports publics, voire la gratuité ciblée (enfants et jeunes, seniors, personnes en recherche d’emploi…). Les outils numériques faciliteront de plus en plus ces approches, s’ils sont utilisés de manière transparente, accessible et éthique. Le produit du péage et des taxes susmentionnées doit servir à financer ces mesures qui entraîneront de toute manière à terme des économies importantes, directes et indirectes.

    Une évolution forte de notre organisation sociale et urbaine !

    De plus, il faudrait imaginer des mécanismes fortement incitatifs pour soutenir les entreprises dans une approche plus créative et flexible de l’organisation du travail (possibilité de varier ses horaires, télétravail, lorsqu’on en a la possibilité et que c’est un choix), bien accompagnée en termes de protection des droits du travailleur / de la travailleuse et qu’un suivi adéquat est mis en place.

    Il y a une attention particulière à accorder au transport professionnel sous toutes ses formes, à la fois pour faciliter ses besoins lorsqu’il est légitime, tout en favorisant une transition du trafic croissant de livraisons dues aux achats en ligne sur des véhicules moins polluants. Le nombre de camionnettes est en effet en train d’exploser en Suisse. Prendre des mesures pour relocaliser le commerce est ainsi tout autant une mesure écologique qu’économique, en favorisant un commerce de proximité.

    Au niveau du trafic, à court terme, il faut passer rapidement toute la ville en zone 30 km/h (ce qui entraînera déjà une baisse significative du bruit et des risques), et multiplier massivement les zones piétonnes ou à priorité piétonne dans les cas où le passage de véhicules reste indispensable. En attendant, un passage au 30 km/h généralisé la nuit, comme dans les villes vaudoises, et comme je l’ai moi-même proposé pour Genève, serait un premier pas important vers moins de nuisances de bruit, très néfastes pour la santé !

    Une amélioration réelle de la qualité de vie pour toutes et tous, sans exception !

    Enfin, cette évolution doit impérativement s’accompagner d’une réelle amélioration visible et mesurable de la qualité de vie pour toutes et tous : moins de bruit, moins de nuisances, plus d’espaces urbains accessibles et conviviaux, des activités collectives dans l’espace public, ce qui passe aussi bien par un aménagement urbain offensif et ambitieux qu’une promotion active de l’occupation positive de l’espace public (culture, proposition sociales, sportives, animations, …), pour toutes les catégories de la population, qui peut bénéficier pleinement de ces améliorations ! Ces mesures doivent s’inscrire dans une histoire convaincante et séduisante, qui fasse envie à une majorité ! La transition climatique ne se fera que si elle est socialement juste, souhaitée et vécue positivement !

     

  • « Nous, saisonniers, saisonnières… » : devoir de mémoire et acte de mobilisation

    La Ville a inauguré, ce mardi 29 octobre, au Commun du Bâtiment d’art contemporain, une exposition très forte, consacrée aux saisonnières et saisonniers à Genève, exposition visible jusqu’au 24 novembre. L’impulsion pour ce projet provient d’une motion votée à une large majorité par le Conseil municipal de la Ville de Genève en septembre 2014, sur la base d’un texte déposé à l’origine par le groupe socialiste.

    Cette exposition résulte de la mobilisation de compétences et de talents aussi bien historiques qu’artistiques, avec l’alliance du Collège du travail, des Archives contestataires et du Collectif Rosa Brux, afin de rendre hommage à ces femmes et ces hommes, tout en leur donnant la parole. Les historiennes et historiens documentent, analysent, mettent en perspective, et les artistes nous incitent à voir les choses autrement, nous bousculent parfois, amènent un regard décalé et créatif.

    Genève est souvent citée comme berceau des droits humains, un lieu au service du dialogue pour la paix et le progrès, un carrefour des idées et des talents. C’est incontestablement aussi une cité multiculturelle, et j’aime la comparer à une belle mosaïque, très riche, avec plus de 40% de résident-e-s étranger-e-s de tous horizons, et 70% de personnes titulaires d’au moins une autre nationalité. Pourtant, il faut également faire face au revers de la médaille, aux faces sombres de notre histoire, aux manquements, aux iniquités et autres inégalités que Genève a couvertes et même souhaitées, dans le cadre d’une politique suisse de l’immigration qui reste une des plus restrictives d’Europe.

    Comme le disait Tahar ben Jelloun : « On est toujours l’étranger que de quelqu’un. », une citation tirée du Racisme expliqué à ma fille. Des générations d’étrangers, à Genève, se sont succédées et ont été différemment étiquetées et traitées. Bien vus et acceptés, lorsqu’ils étaient fortunés et lettrés, ou au contraire stigmatisés et filtrés. C’est l’histoire même des migrations. Durant la deuxième partie du 20ème siècle la Suisse a décidé de faire appel aux personnes venant d’Italie, puis d’Espagne, du Portugal, d’ex-Yougoslavie…

    L’exploitation du travail humain n’est pas en soi une rareté, malheureusement, dans notre monde, hier et aujourd’hui, bien au contraire. Ce qui est particulièrement choquant dans l’histoire des saisonnières et des saisonniers, c’est ce statut officiel, le système inique mis en place. Parce qu’il s’agit bien d’un système, voulu et assumé, ancré dans des lois et des dispositifs formels, qui ne considère plus les personnes comme des êtres humains à part entière, mais réduits à des outils de production. Max Frisch l’a tellement bien dit avec sa célèbre phrase : « Nous attendions des bras et ce sont des hommes qui sont venus. » C’est particulièrement choquant que l’on puisse imaginer des hommes et des femmes non pas pour ce qu’ils et elles sont mais uniquement pour une petite partie de leur être, leur dimension purement productive. A Genève, dans les années 70, on comptait jusqu’à 10’000 titulaires de ce permis, chiffre qui redescendait brutalement dans les années de basse conjoncture, la Suisse « exportant » ainsi le chômage vers les pays d’origine[1].

    L’exposition concilie des éléments « objectifs », issus des archives, avec toutes les traces « formelles » laissées par l’histoire, les documents administratifs, les affiches, etc., et la parole des concerné-e-s ou de leurs enfants et petits-enfants, sans oublier un formidable matériel photographique très marquant. Ainsi on donne, tardivement certes, la parole à ceux et celles qui, à l’époque, n’avaient aucun droit à la parole.

    En ma qualité d’élu municipal en charge de la culture, j’ai tenu à soutenir très activement cette démarche, car il s’agit d’une formidable contribution à la fois artistique et historique pour générer et diffuser ce travail de mémoire. Cette exposition est nécessaire, même si c‘est un acte modeste face au poids de cette histoire. Ce pan de notre histoire, nous devons y faire face, pour ne pas infliger de double peine à celles et ceux qui ont subi ce statut imposé. Double parce qu’ils et elles ont été une première fois niés quand ils subissaient ce statut et travaillaient dans l’ombre et au noir. Les cantonner dans l’oubli, c’est la deuxième peine.

    Pour toutes celles et tous ceux qui se retrouveront dans cette histoire, pour toutes celles et tous ceux qu’elle renforcera dans leur volonté de lutter pour que les droits humains, et pour tous ceux et toutes celles, plus jeunes peut-être, qui découvriront la vie des saisonniers et des saisonnières à Genève, je rends hommage aux porteurs de ce projet, mais également aux artistes et historien-ne-s qui s’y sont impliqué-e-s, et bien évidemment aux saisonniers et saisonnières ou enfants de saisonniers et saisonnières qui ont accepté de témoigner.

    Exposition "Nous saisonnières, saisonniers"
    https://www.ville-geneve.ch/fileadmin/public/images/agenda_et_actualites/2019/expo-saisonniers-ville-geneve-contenu.jpg

    [1] « 1970- 2009: 40 ans d’observation conjoncturelle à Genève », OCSTAT, Genève, 2010

     

  • Le budget de la Ville, un acte politique et des choix

    Avec sa proposition de budget 2020 pour la Ville de Genève, dans la continuité de l’engagement solidaire et responsable pour lequel il a été élu, le Conseil administratif a tenu à marquer sa volonté de soutenir activement les politiques publiques essentielles à notre Cité, notamment en matière sociale, familiale, culturelle et sportive.

    Ainsi, outre des moyens conséquents pour la petite enfance (poursuite de l’effort nécessaire pour augmenter l’offre de places en crèche), pour les sans-abris et autres personnes précarisées, pour les associations qui se battent pour l’égalité entre femmes et hommes, pour le plan de lutte contre le harcèlement de rue, le Conseil administratif a introduit dans ce budget la dernière tranche d’augmentation de la subvention nécessaire au fonctionnement de la nouvelle Comédie qui ouvrira ses portes et ses scènes en 2020 à la Gare des Eaux-Vives.

    Un budget pour la nouvelle Comédie

    Au budget 2019, le Conseil municipal avait accepté la première tranche d’augmentation, qui se montait à 2.5 millions ; cette fois, il s’agit d’un montant de 4.3 millions, afin d’arriver à un montant global de 12.58 millions de soutien public nécessaire afin que cette institution puisse pleinement concrétiser ses missions en matière de création théâtrale et se mettre au niveau des institutions suisses et européennes de référence. Je précise néanmoins que l’apport public restera plutôt dans le bas de la fourchette en comparaison avec d’autres institutions comparables en Suisse, à Lausanne, Berne, Zurich ou Bâle.

    L’éclosion de la nouvelle Comédie représente un engagement très fort de notre Cité pour la culture en général, pour le rayonnement culturel de Genève, et pour la vie d’un nouveau morceau de ville tel qu’il se dessine aux Eaux-Vives. Mais elle doit être aussi le catalyseur de nouveaux liens approfondis entre le riche terreau culturel genevois et un public renouvelé. Enfin, précision d’importance, cette augmentation a pu se faire sans devoir couper ailleurs dans les budgets culturels, ce qui n’est pas la moindre des choses, au vu des craintes légitimes qui avaient été émises.

    Il aurait également été légitime que le Canton participe à cette aventure et des signaux positifs ont été émis par le Conseil d’Etat entré en fonction en juin 2018 (Discours de St-Pierre, Programme et de législature, projet de Message culturel), malheureusement pas encore suivis d’effets concrets. Tôt ou tard, le Canton devra enfin assumer ses responsabilités dans ce domaine !

    Reste à souhaiter que le Conseil municipal accepte à son tour de voter ces moyens ; je suis confiant dès lors que la majorité des groupes reconnaît l’enjeu. De plus, aussi bien les votations référendaires de 2016 et 2017 contre les coupes dans les budgets culturels, que le vote massif en faveur de l’initiative populaire pour une politique culturelle cohérente et concertée le 19 mai 2019 (83% de oui !), montrent bien l’attachement profond des Genevoises et des Genevois à une politique culturelle ambitieuse, diversifiée et inclusive. Je saisis l’occasion pour rendre hommage à toutes celles et tous ceux qui se sont battus avec beaucoup d’énergie et d’assiduité pendant des décennies pour que ce projet se réalise, notamment au sein de l’Association pour la Nouvelle Comédie (ANC) et de la Fondation d’art dramatique, et aux directions successives de la Comédie, qui ont su faire vivre cette institution à son adresse actuelle au Boulevard des Philosophes malgré ses limites structurelles, tout en s’engageant activement sur le chemin de la nouvelle Comédie. La codirection actuelle, Natacha Koutchoumov et Denis Maillefer, en fonction depuis l’été 2018, ont pris le relais de cet engagement collectif et s’engagent très concrètement avec beaucoup de talent et d’énergie pour réussir cette formidable mue !

    Un engagement accru pour la culture

    Dans ce projet de budget 2020, le Conseil administratif a aussi intégré d’autres de mes propositions, comme un soutien accru à la belle scène de théâtre pour petits et grands enfants, le Théâtre Am Stram Gram, mais aussi les Cinémas du Grütli qui jouent un rôle essentiel pour faire vivre le patrimoine cinématographique, les deux festivals de cinéma qui contribue activement au rayonnement de Genève comme ville de culture, de cinéma, de droits humains et d’innovation numérique, le FIFDH et le GIFF. Il y aura des moyens accrus pour les ensembles de musique classique, le festival Antigel et le MAMCO, un des piliers de la rénovation prochaine du Bâtiment d’art contemporain (BAC).

    Un engagement pour le sport : développement et nouvelles infrastructures

    Et le sport n’est pas en reste puisqu’après avoir annoncé deux soirées ouvertes au public à la Piscine des Vernets et au vu de l’ampleur de la demande en natation, le projet de budget prévoit les moyens pour deux soirées ouvertes au public à la Piscine de Varembé, de même que les moyens pour exploiter l’espace rénové où se trouve le Boulodrome, le mur de grimpe et les cabines de squash. Par ailleurs, un fonds spécifique dédié aux mesures du Plan Genre et Sport, prévoyant de renforcer la place légitime des femmes dans le sport, est inscrit dans le projet de budget.

    Cela me permet de rappeler que, hors budget de fonctionnement, l’effort en matière de sport s’exerce beaucoup  sur le plan des investissements puisque les crédits pour plusieurs gros projets seront bientôt déposés au Conseil municipal : Centre sportif des Eaux-Vives, Maison du Sport à Vernier, et Halle couverte de tennis à Vernier.

    Renforcer le service public, face aux défis d’aujourd’hui et de demain !

    Plus largement, j’insiste sur le fait que Genève, ville-centre d’une agglomération transfrontalière de près d’un million d’habitantes et d’habitants, et 2ème ville de Suisse, ville internationale, fait face aujourd’hui et demain à des défis considérables. Comme dans d’autres agglomérations en Suisse ou ailleurs, nous constituons à la fois le moteur d’une région, le centre économique, social et culturel de la vie collective, mais aussi par conséquent le réceptacle principal d’attentes importantes et nombreuses, avec de fortes charges de ville-centre, dans un monde qui change rapidement et se complexifie. Les inégalités sociales se creusent, le changement climatique constitue une urgence avérée qui a des impacts à brève échéance, la transition numérique s’accélère et concerne directement le service public, la diversification du tissu économique et de l’innovation  doit être renforcée afin de préserver une prospérité durable et partagée, et nous devons tenir compte de contraintes budgétaires et de charges difficilement compressibles.

    Après deux législatures marquées par une droite dure destructrice et incompétente, il est indispensable de redonner à notre Ville une majorité constructive et progressiste au Conseil municipal, lors des élections municipales en mars et avril 2020.

  • La transition numérique, au service des villes durables ?

    Mon année de mairie qui se termine fin mai 2019 a été dédiée aux enjeux du numérique d’un point de vue de la vie urbaine (administration  en ligne, outils participatifs, open data, citoyenneté numérique, démocratisation culturelle, etc.). C’est dans ce cadre que j’ai demandé à l’Unité Information et Communication de la Ville de réaliser une série de petits films documentaires en format vidéo qui thématisent ces enjeux. Parmi ceux-ci, un en particulier concerne le coût écologique du numérique et de l’explosion de la consommation dans ce domaine. Car le numérique n’est pas en lui-même une solution aux problèmes de l’environnement. Il aurait même plutôt tendance à causer des problèmes supplémentaires, quand on pense à l’exploitation des terres rares ou aux impacts des serveurs en matière énergétique, entre autres.

    Ceci étant, ce serait une erreur de « jeter le bébé avec l’eau du bain », en quelque sorte : la transition numérique est une réalité incontournable. Autant l’orienter de manière à ce qu’elle soit écologiquement et socialement supportable, voire qu’elle contribue réellement à un monde meilleur, plutôt que d’en accentuer les tendances centrifuges et destructrices. Lorsqu’il est question de numérique, le débat est facilement éclaté entre de nombreuses dimensions perçues comme distinctes, difficiles à aborder de manière cohérente, globale et compréhensible.

    Le numérique des villes

    Dans ce contexte, je suis convaincu que les villes ont un rôle crucial à jouer. J’ai d’ailleurs initié une Journée du numérique des villes genevoises, qui aura lieu demain, vendredi 24 mai. Car non seulement les villes sont directement au contact quotidien avec la population, elles offrent des prestations de proximité, elles œuvrent à résoudre les problèmes très concrets du quotidien, localement. Mais en plus, je suis convaincu que les villes peuvent faire ce que les Etats échouent pour l’instant à mettre en place, bien malheureusement. Car les villes ne sont pas engoncées dans les enjeux géostratégiques des nations. Les villes sont à même de mobiliser les intelligences collectives, de catalyser une intelligence pratique qui puisse réunir les énergies au-delà de l’action de l’administration, fédérer les mobilisations et catalyser l’innovation au service de toutes et tous.

    Proposer une vision critique, locale et démocratique

    Les villes peuvent, avec leurs partenaires, contribuer à ce que le monde numérique soit démocratisé et doté de règles transparentes et partagées, ne dérive pas uniquement vers des usages mercantiles ou sécuritaires, et soit purgé de manipulations par des algorithmes opaques et suspects.

    Genève est une ville internationale dont la tradition en matière humanitaire n’est plus à prouver. J’aimerais que nous puissions offrir le même espace pour les questions liées au numérique : proposer un regard critique, éthique, citoyen, participatif et accessible sur ces questions. Les enjeux qu’il faut aborder de manière transparente et créative sont nombreux : mettre en avant l’ouverture contre l’accaparement des données et des logiciels, lutter pour la neutralité et l’accessibilité, valoriser les processus ouverts, l’open data et l’open source, plutôt que le cloisonnement propriétaire et commercial. La défense de cette liberté démocratique et partagée est une lutte que nous devons mener et je pense, je le souhaite en tant que Maire, que Genève doit devenir le lieu de référence sur le plan mondial de la lutte pour la garantie de ces principes. Nous avons tout intérêt à allier ressources et compétences locales et internationales, comme le fait par exemple Open Geneva.

    Deux projets pour Genève

    Dans ce contexte, outre les projets concrets de transition numérique (enfin !) touchant l’administration municipale dans son fonctionnement  et dans sa relation avec les citoyennes et citoyens, je porte deux projets qui me semblent pertinents et importants :

    –          Créer une véritable « université populaire du numérique », sous forme de mise en réseau des nombreux acteurs qui s’engagent de près ou de loin pour démocratiser le monde numérique et défendre une approche inclusive et accessible ; une telle structure doit être ouverte, collaborative, horizontale, agile.

    –          Créer une fondation sur le plan de la Genève internationale qui aurait pour mission de favoriser l’Open source, l’Open data, la mise en commun des données et la protection de l’identité numérique de chacun.

    Pour une transition durable

    Car quoi qu’il en soit, nous avons besoin de réfléchir autrement. C’est une évidence. Nos pratiques anciennes nous mèneront dans un cul-de-sac. Nous devons impérativement aujourd’hui trouver le moyen de se fabriquer une sortie. Et pour cela les nouvelles générations nous montrent la voie. La transition numérique ne représente pas une panacée mais, bien apprivoisée et mobilisée, elle constitue un espace précieux pour nous soutenir vers une transition écologique qui soit aussi socialement supportable et durable.

  • Le « magic » tour de passe-passe des CFF

    A l’heure où Greta Thunberg a provoqué une prise de conscience mondiale sur l’importance de la transition écologique. Alors qu’une large tendance se dessine, que ce soit au niveau communal, cantonal ou fédéral, pour favoriser la mobilité douce et les transports publics. Alors que les axes autoroutiers sont systématiquement bouchés aux heures de pointe (regardez Genève-Lausanne ou le contournement autoroutier de Genève). Eh bien à ce moment crucial, les CFF voient leur échapper une étude digne d’un « magic » tour de passe-passe…

    Révélée suite à une fuite, cette étude laisse entendre que les CFF veulent augmenter le prix de l’abonnement général, le jugeant « pas assez rentables »… Faut-il rappeler que l’abonnement général 2ème classe annuel coûte tout de même 3860.-, ce qui implique déjà de beaucoup prendre le train.

    On peut se poser plusieurs questions face à cette annonce de hausse de 10% du prix de l’AG et même de 45% (!!!) pour l’AG junior.

    La première interrogation est de constater que si les CFF sont maintenant une entreprise, ils restent une entreprise en mains publiques, avec une mission de service public : permettre à la population de se déplacer et le faire en respectant l’environnement, car le train rejette beaucoup moins de CO2 que le transport routier. Sauf erreur, ce but de protection de l’environnement n’est pas remis en question par le Conseil fédéral ou par la majorité des Chambres fédérales.

    La seconde consiste à regarder l’actualité : un nouveau modèle fait maintenant fureur au niveau des stations de ski, le « magic pass ». Celui-ci correspond à une baisse massive de prix en lien avec un achat précoce d’un forfait annuel global pour l’ensemble des stations. On constate, après 3 exercices, que le nombre de journées/skieurs a massivement augmenté et que l’opération est globalement rentable, notamment avec les retombées indirectes. Pourquoi les CFF s’ingénient-ils donc à vouloir proposer des solutions d’un autre temps, basées sur un calcul de rentabilité simplet pour chaque proposition tarifaire, et pas sur du « mobility pricing » intelligent et qui facilite la mobilité douce ?

    A l’heure où la qualité des prestations des CFF peinent à suivre (il suffit de prendre régulièrement l’axe Genève-Lausanne-Berne-Zurich pour le constater) et où le train a le vent en poupe, c’est au contraire un abonnement annuel beaucoup moins cher, et en particulier pour les jeunes, qui devrait être proposé. Un sésame que chacune et chacun aurait en poche, sans trop se demander si aller 3 fois par semaines à Lausanne suffit à rentabiliser un AG (ce n’est actuellement pas le cas).

    Bref, les CFF nous sortent un « magic » tour de passe-passe, qui montre qu’ils n’ont pas bien pris la mesure de la transition écologique, ni des solutions dynamiques à mettre en place. Mais ce n’est qu’une étude. Tout n’est sans doute pas perdu…

     

Sami Kanaan est Maire de Genève 2014-2015, 2018-2019 et 2020-2021, Conseiller administratif en charge du Département de la culture et du sport, puis de la culture et du numérique, Président de la Commission fédérale pour l’enfance et la jeunesse, Vice-président de l’Union des villes suisses et Président de l’Union des villes genevoises.

suite…

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